Yves MEYER(1923-2024) Photo Service historique de la Défense, Vincennes |
Né le 18 décembre 1923 à Paris, Yves Meyer est issu d’une famille d’origine alsacienne. Sa jeunesse est marquée par les mouvements de scoutisme laïque. Membre des Éclaireurs de France, il y apprend la vie en collectivité, la rigueur et le sens du commandement, autant de qualités qui lui seront utiles dans la clandestinité. Ayant lu Mein Kampf avant la déclaration de guerre, il est bien conscient de la montée des périls. Trop jeune pour être mobilisé, il connait l’exode de mai-juin 1940. Le 18 juin 1940 alors qu’il séjourne à Palavas-les-Flots (Hérault), il entend l’appel du général de Gaulle. Avec sa famille, il s’installe bientôt à Marseille où il obtient un poste dans une compagnie de navigation. Refusant viscéralement la défaite, bien décidé à agir, Yves Meyer commence par entreprendre des actions de propagande. Il diffuse alors des tracts dans les boîtes aux lettres et perturbe la projection des actualités allemandes dans les salles de cinéma. Puis, il dérobe des cachets officiels à la préfecture de Marseille afin de confectionner des faux papiers nécessaires aux premiers résistants. En 1942, souhaitant ardemment rejoindre la France libre à Londres, Yves Meyer est mis en relation avec Pierre Julitte, envoyé par le BCRA en septembre 1942 pour fonder le réseau Julitte. Celui le recrute immédiatement dans son réseau et lui demande de rester en France pour l’aider à développer cette organisation clandestine. En novembre 1942, devenu permanent de ce réseau, il a la charge du transport des postes émetteur-récepteur et de la protection des radios lors des transmissions clandestines. En mars 1943, après l’arrestation du Pierre Julitte et le démantèlement du réseau, Yves Meyer est pris en charge par le mouvement Combat à Grenoble (Isère) qui tente de le faire évader par l’Espagne. Arrêté à Mont-Louis (Pyrénées-Orientales), il est remis à la Gestapo mais parvient à leur échapper lors de son transfert à la citadelle Perpignan. Il regagne alors Grenoble où il entre en contact avec l’organisation Prévôt rattachée par la suite au Service National Maquis (SNM) qui dépend des Mouvements Unis de la Résistance (MUR). En juillet 1943, dans le cadre de ses nouvelles missions, il crée un maquis à Albiez-le-Vieux (Savoie). Alors qu’il n’a pas encore vingt ans, ses qualités de meneur d’hommes développées lors de ses années de scoutisme lui permettent d’encadrer et de former aux combats à venir de jeunes requis du Service du Travail Obligatoire. À La Mure (Isère), il prend aussi en charge un groupe de mineurs espagnols qui ont combattu dans les rangs des républicains durant la guerre d’Espagne. Lors de ses incessants déplacements, il est arrêté par la Gestapo à la gare de Grenoble (Isère) mais parvient encore une fois à s’évader. Il rejoint dès lors le Service National Maquis à Paris. En mars 1944, fort de son expérience, Yves Meyer est dirigé vers la région A (Seine-Inférieure, Nord, Pas-de-Calais, Somme) pour devenir l’adjoint au chef régional du Service national maquis, le commandant de Kergaradec. Mais bientôt la répression s’abat sur Yves Mayer. À la suite de l’infiltration d’un agent travaillant pour la Gestapo, il est arrêté le 3 juin 1944. Torturé à Rouen, puis rue des Saussaies à Paris, il est écroué à Fresnes et à Rouen avant d’être interné au camp de Compiègne-Royallieu. Il est alors déporté en Allemagne, par le convoi du 2 juillet 1944 plus connu sous le nom du « train de la mort ». Sur 2 162 hommes déportés, au moins 530 décéderont durant le trajet (1). Arrivé le 5 juillet 1944 au camp de concentration de Dachau, Yves Mayer devient le matricule 76 569. Il est transféré dans l’un des camps du Neckar pour être affecté au Kommando de la mine d’Obrigheim. Ayant survécu au typhus fin 1944, il est libéré par l’armée américaine à Osterburken (Bade-Wurtemberg) le 4 avril 1945. Très affaibli par les conditions inhumaines du régime concentrationnaire Yves Meyer, qui ne pèse plus que 32 kilos, est rapatrié en France le 21 mai 1945. Après la guerre, il développe une société dans le secteur de l’imprimerie. À la retraite, fidèle à ses camarades, il ne cesse de témoigner de son parcours de résistant-déporté dans les établissements scolaires en rappelant que la Résistance était un combat « pour la démocratie contre la dictature » et qu’il faut aujourd’hui « lutter contre les excès ». Commandeur de la Légion d’honneur, titulaire de la médaille de la Résistance française (décret du 15 octobre 1945), membre de la commission nationale de cette décoration crée par le général de Gaulle le 9 février 1943, Yves Meyer était membre du conseil d’administration de la Fondation de la Résistance depuis novembre 2020. Décédé le 31 janvier 2024, un hommage lui a été rendu dans la cour d’honneur de l’Hôtel national des Invalides le lundi 19 février auquel assistait notre président Gilles Pierre Levy. Frantz Malassis (1) Cf Livre mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression et dans certains cas par mesure de persécution 1940-1945, Paris, Fondation pour la Mémoire de la Déportation, éditions Tirésias, 2004, tome II, p. 1081. |